Bureau de création

Landal




A la mémoire d'Améryl et Maëlle





A des milliers de kilomètres, aux environs de la frontière ouest de Kalamai, existe une vallée qui ressemble au fond de la conscience humaine : la douleur, la folie, le désespoire mêlé de haine y règne sans foi ni loi. Ensevelie par l'oublie, elle ne figure sur aucune carte.
Perdue au coeur de cette vallée, une ville qui d'après les ruines, aux vues de l'architecture, devait être resplendissante. Passé ces vestiges...un fleuve...
Le fleuve d'Arvouc'h descend des Monts Braspar pour se scinder en deux bras: l'un se jetant dans un lac bordé de forêts aujourd'hui calcinées, l'autre disparaissant derrière la Croupe de l'Âne, une chaîne de massifs onduleux lesquels encastraient fièrement jadis la demeure du seigneur Améryl de Landal, mon père.
Sa forteresse simple dans sa structure en granit arborait solennellement sa bannière. Les bas reliefs monumentaux relatant les épopées des siècles derniers qui ornaient les enceintes de l'édifice défiaient les Monts de l'Aber, volcan éteint depuis déjà deux siècles. Crozot minautore belliqueux en était le gardien .

Améryl de Landal forçait le respect. Puissant magicien et imprévisible, il était apprécié de tous. Sa culture et son intérêt pour les arts avait fait gravir autour de lui une élite d' intellectuels.
Ses stratégies de combats étaient infaillibles face aux invasions d'orques , minotaures et autres créatures maléfiques, groupuscules des cités sombres des alentours de Kalamai, assoiffés de fiel et de pouvoir.

Maëlle fut ma mère...

Maëlle fut ma mère. Améryl de Landal fut troublé non seulement par sa grâce mais aussi par son aisance à manier les armes. Ils formèrent un couple heureux. A l'adolescence, rétive d'esprit, je n'attachais aucune importance à leur sens morale tant à leur autorité. Lassée d'entendre parler de stratégies et de guerres, je m'étais construite une forme de vie paralléle. Je fuyais la forteresse la journée pour parcourir la vallée, les forêts et les jolis monts de la Croupe de l'Âne. Je passais mon temps parmi toutes sortes de créatures à discuter avec des elfes des bois, particulièrement avec Yan-Ho qui avait une centaine d'années ce qui était plutôt jeune pour un elfe. Très attirée par les vertues des plantes et autres biens faits de la nature, je me détournais de la magie que m'enseignait mon père. Les elfes m'apprenaient leur langage ce qui le mettait très en colère, ulcéré par mon insolence.

Ce fut à peu près pendant l'âge de bronze que des tiraillements se firent sentir autour de Kalamai; le monde instable avait besoin de puissance pour se rassurer. Deux royaumes ennemis se disputaient la région d'Orvane à l'est de Landal. Il y avait d' un côté le royaume de Dolmat qui s'étendait sur les immenses steppes du nord et de l'autre le royaume de Dunevigue qui rassemblait de grandes cités prospères situées au sud. Les Duneviguiens privilégiaient les arts, la science et la navigation. Les Dolmates, eux , n'aimaient rien plus que la chasse et la vie au grand air. Les Duneviguiens prenaient les hommes du nord pour des barbares. Les Dolmates méprisaient ce qu'ils appelaient "les frivolités du sud ". En fait ces deux royaumes n'avaient qu'un seul point commun; leurs souverains voulaient implanter à quelques kilomètres de Landal une colonie dans la région d'Orvane. Améryl vite alerté par leur projet essaya de les dissuader pour préserver la tranquilité de sa vallée. De longs débats se succedèrent entre les trois personnalités; seigneur Cantos du royaume de Dolmat, seigneur Alban du royaume de Dunevigue et Améryl du royaume de Landal.
Crozot l'impétueux maître des monts de l'aber, inquiété par ces polémiques, implanta à la stupéfaction de tous, sa colonie composée de minotaures, d'orques et d'infernaux. Il en profita pour manipuler Cantos et le monter contre son rival seigneur Alban. C'est alors qu'Améryl proposa mains fortes aux Duneviguiens. Une terrible bataille suivit. Ce fut la défaite pour Crozot et les Dolmates. Par peur des représailles du minotaure, ces derniers désertèrent son armée et capitulèrent devant les Duneviguiens et les Landaliens. Il n'y eut plus de colonie et la vallée fut en liesse pendant plusieurs jours.

...J'étais là, assise...

J'étais là...assise parmi les monts de la Croupe de l'Âne concentrée sur les mélodieuses complaintes de Yan-Ho. Puis... de violentes secousses... l'atmosphère devint étouffante... Debouts, interdits, on observait la scène... Une mer de lave fonçait droit sur la vallée, puis d'ondulations en ondulations naquit une gigantesque vague de feu dont l'ascension atteignit la voûte céleste pour s'abattre sur la forteresse, sa population, Maëlle et Améryl seigneurs de Landal... condamnés...
Crozot avait prié Hassar pour réveiller l'Aber... Il s'était vengé...
Ensemble, Yan-Ho et ceux qui n'avait pas encore péri dans les flammes enfourchâmes des créatures volantes au hasard, difficiles à maîtriser dans la panique et nous nous envolâmes.
Malgrès la confusion de tous au regard de ce drame, nous primes la direction de Kalamai pour y trouver aide et réconfort. Après une pénible et longue marche, nous parvînmes enfin devant ses portes non moins sans encombres en raison de malsaines rencontres.
Yan-Ho et les siens rejoignirent l'Elyseum dans la province d'Amphise pour protéger la nature et la restaurer.
Je suis devenue à présent membre de la Garde Céleste de Brasamical et je prie mon dieu Kereb d'avoir été admise.

Grâce à ma nouvelle famille, j'ai fait bâtir une nouvelle forteresse non loin de l'ancienne . Mais la vie a quitté cet endroit ou l'obscurité est plus profonde quand il fait nuit et la lumière plus brûlante quand il fait jour. Pourtant, une mystérieuse population y subsiste encore; des hommes toujours en fuite, des vieillards mourant, pleurant. La vie les a rejetés...ils cherchent l'oubli sous des nuits et des jours interminables pour des raisons qu'il ne vaut mieux pas avoir vécu.
C'est ici que j'ai grandi mais ce n'est pas là que j'ai appri; c'est là que les miens vécurent et c'est ici qu'ils périrent. Les murs sont porteurs de souvenirs mais il reste des traces de calcination, témoins du drame...là pour l'éternité...pour nous rappeler...comme une punition. Une poussière noire qui pénètre dans la pierre jusqu'aux profondeurs de l'âme...mon âme, la culpabilité de ne pas avoir été au près des miens ce jour là, de ne pas leur avoir dit adieu. La culpabilité d'avoir été ce que je fus. Les rares traces d'oeuvres humaines ne sont plus que des murailles chancelantes, plus fragiles qu' un château de sable et que l'abandon s'emploi à gommer méthodiquement du décor...Là ou il ne reste que des ruines, ce sont les ruines qui brûlent. Mon âme est à leur effigie.

Magicienne j ' honore Améryl, Maëlle, mon dieu Kereb et la Garde Céleste de Brasamical. Je dois détruire ce qu'il y a à détruire... cet apôtre du mal, Crozot et sa horde de feu !...et reconstruire ce qui peut l'être encore.


Louve de Landal



à venir:
Les sentiers vers Kalamai
La Quête de Yan-Ho
Les Méandres de l'Aber

Les sentiers vers Kalamai







Je me souviens...lorsque Yan Ho et les siens décollèrent sur nos montures, des Phénixs argentés, pour échapper aux flammes de l'Aber. Nous avions volé pendant plusieurs jours, ponctuant notre route dans les airs de quelques haltes aux sommets de monts et collines.
Kalamai était encore loin...

Lauderne se trouvait à la pointe extrême des terres émergées au nord. Sa situation géographique très particulière l'avait protégée pendant de nombreux siècles de ses voisins de l'Est, les Lannilois de Lannilis. Des montagnes quasiment infranchissables barraient la voie terrestre; des tourbillons, des tempêtes et des récifs sans nombre rendaient difficile l'accès aux côtes.
Mais les hommes, quelles que soient leur race ou leur croyance, sont tétus.
Les Dolmates humiliers par la défaite d'Orvane se mirent en tête de conquérir Lauderne mais les Lannilois n'avaient pas l'intention de se faire usurper le royaume qu'ils convoitaient depuis si longtemps. Les explorateurs Dolmates avaient réussi à trouver un passage dans les montagnes, plus exactement sous les montagnes, pendant que leurs concurrents Lannilois s'acharnaient à ouvrir une voie maritime, ces derniers avaient construits des navires solides et fiables; après bien des efforts, ils étaient parvenus à établir un port en Lauderne.
Pendant que les colons civils essayaient de s'implanter avec leurs familles dans les plaines et les forêts de "ce nouveau monde", les armées, elles s'affrontaient. Aucun camp ne semblait prendre l'avantage.

... Nous atterrîmes sur une colline, tous méritions repos... Au loin se dressaient des sommets émaciés qui s'enflammaient dans la lueur du couchant. " Les montagnes de Turne " songea Yan Ho. Une force réelle se dégageait de tout son être. Cela venait peut être de ce qu'il se tenait droit, sans bouger, face aux bourrasques qui montaient de la vallée. Son armement se résumait à un arc, une poignée de flèches et une dague.
Il entendit des bruits de pas dans son dos mais ne se retourna point.
" as tu vu quelque chose ? " demandais je.
Yan Ho indiqua du menton l'océan de végétation qui s'étendait en contrebas. La cime des arbres renvoyait des reflets gris vert, soulignés par la lumière rasante.
" Il y a un groupe qui avance à deux kilomètres au sud de notre position " dit il " les petits animaux fuient à leur approche ".
J'acquiescais en silence. L'oeil perçant et l'oreille fine je ne pouvais en aucune façon rivaliser avec l'admirable précision des sens elfiques.
" Une bande d'Orques en maraude? " pensais je " non , les Orques se déplacent avec d'avantage de discrétion... des hommes alors?
Sans doute, restait à savoir à quel camp ils appartenaient , Dolmates ou Lannilois? " ...

" C'est étrange, " réfléchit tout haut Yan Ho " il n'y a pas de bastion dolmate ou lannilois dans les proches environs. Qui peuvent être ces gens? "
" Allons voir " tranchais je.

Nous descendîmes la pente par un sentier sinueux et pénétrâmes bientôt sous le couvert des arbres. De dorée, la lumière devint grise. Il avait plu durant l'après midi, et les feuillages dégouttaient d'eau .Nous marchâmes sans bruit. Les bottes de Yan Ho évitaient les branches mortes presque naturellement, comme s'il connaissait leur emplacement par coeur.
...

Des éclats de voix nous parvinment bientôt. Cela ressemblait à une dispute. Des gens argumentaient pour définir la meilleur route à prendre.J'avançais et écartais le rideau de branchages. Cinq individus, dont deux femmes, se figèrent en m'apercevant. Les femmes montaient à cheval , en amazone, alors que les autres cheminaient à pied. Deux mules chargées de bagages fermaient ce cortége.L'un des hommes, un jeune seigneur au manteau bordé de fourrure, posa la main sur le pommeau de son épée et vint se placer devant les cavalières.
...

" Qui va là ? " lança t il " Ami ou ennemi ? "
Nous apparumes à notre tour. Je remarquais la broche qui retenait le manteau du jeune noble. C'était la couronne de Lannilis, l'emblême des hommes de l'Est.
" Amis ou ennemis ? " répéta le jeune homme .
" Vous pouvez garder votre épée dans son foureau, Lannilois, " rérorquais je . " Nous ne vous voulons aucun mal. "
"Qui êtes vous donc ? "
" Nous sommes les " coureurs des bois " de l'Arvouc'h et je suis Louve, filles des defunts seigneurs Maëlle et Améryl de Landal. Les amis qui m'accompagnent sont Yan Ho Maître des Bois de la Croupe de l'Äne et quelques fidèles."
...